Tu veux être invisible ?
Tu veux être personne ?
Tu veux trimbaler ta graisse dans des couloirs pisseux chaque matin, chaque soir ?
Tu veux quémander, traîner parmi les prolos, parmi les victimes ?
Tu veux vraiment être de ces crasseux, de ces jamais rien, de ces sans passé, de ces sans avenir, de cette masse merdeuse qui ne va nulle part, de cette masse informe qui ne construit rien ?
L'avorton boutonneux écoute attentivement. Il serre ses petits poings. Il se met à croire que ces imprécations sont belles, que ces sentences qu'on lui assène seront sa révolte, son cri au monde. Il va se venger. Il va leur montrer. Il va entasser. Il va se hisser sur le trône, il va regarder ses tortionnaires avec mépris. Il va devenir le roi.
Y'a juste un grain de sable dans la belle mécanique : ils sont des milliards comme lui. Ils veulent tous monter.
Mais qui est assez crétin pour croire que le sommet d'une pyramide ressemble à une grande terrasse arborée, à un Eden prêt à accueillir tout le monde ?
Pour arriver en haut gamin, faudra balancer les gus qui seront sur ton chemin. Crois moi, y'aura pas de place pour les bons sentiments. Tu balanceras les cadavres par milliers, ils serviront de purin à l'organique structure. Tu pourras te reposer quand tu commenceras à reporter des couches. Tu pourras profiter pleinement de l'empire que tu auras construit. T'auras tout l'temps pour penser, la fin de vie ça dure un bail maintenant.